Le silence des lauzes

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L’association a invité Christian Lapie fin 2002 pour approfondir notamment deux questions : Dans ce paysage gagné par l’abandon, où les traces disparaissent et les repères viennent à manquer, comment marquer l’espace pour permettre à chacun de se le réapproprier ?

 

Comment « semer une graine de résistance » contre l’enfrichement, par un usage des lieux réinventé, afin que des « clairières ouvertes » laissent encore percevoir les traces du passé ?

 

 

La rencontre

Parce que l’on ne réalise pas une intervention artistique en milieu naturel comme on le fait dans un musée ou une galerie, le choix de cet artiste, retenu parmi trois artistes sollicités, relève des mêmes exigences que pour Domingo Cisnéros : l’association s’est encore une fois adressée à un artiste qui travaille depuis longtemps en plein air, en s’inspirant des lieux et de leur histoire. Il ne s’agit pas de réaliser une sculpture, même finement ciselée, mais d’ajouter un élément dans le paysage qui trouve sa place et y ajoute un sens nouveau. Ce travail d’invention, pour qu’il ait du sens, ne peut se faire qu’en respectant l’existant, c’est-à-dire en particulier ce qui a été construit par les anciens. Pour dialoguer avec l’existant, l’artiste doit proposer un « langage » qui s’accorde avec celui des anciens : en utilisant par exemple les matériaux locaux comme la pierre ou le bois et en respectant l’aspect « rude » du paysage par une expression brute.

 

Cette démarche suppose que l’artiste prenne le temps de s’imprégner du lieu, en comprenne les enjeux et sache, avec force et humilité, proposer un nouvel usage, une nouvelle lecture de l’espace. Cette exigence constitue une garantie pour que les œuvres produites trouvent leur place le long du sentier au point de sembler être là depuis toujours.

 

Christian Lapie utilise depuis plusieurs années le même langage : de sombres silhouettes de bois noir qu’il dispose selon les lieux, de façon à révéler leur histoire, leur organisation. Ces silhouettes, de hauteur variable, à peine esquissées dans le bois brut, suggèrent plus qu’elles n’expliquent et amènent le visiteur à s’interroger. Là où Domingo Cisnéros souhaitait révéler la « sacralité de la nature », Christian Lapie tente de révéler « l’esprit des lieux ». C’est cette démarche artistique qui a retenu l’attention des membres de l’association et justifie cette nouvelle résidence.

 

 

Le site retenu

Venu en Juin 2002, Christian Lapie a identifié deux lieux d’intervention sur le sentier des lauzes : l’un dans un vallon sur la commune de Saint-Mélany, le second sur les crêtes de la commune de Dompnac. Deux sites pour une seule sculpture. Les silhouettes sont toutes issues du même tronc d’arbre venu du plateau. Leur présence en ces deux lieux répond au souhait de Christian Lapie de tisser des liens entre ces lieux, de renforcer ce lien qu’est le sentier, entre les communes de Saint-Mélany et Dompnac. Dans le vallon, l’artiste installe sur un ancien jardin un groupe de silhouettes faisant face à un petit pont de pierre. Sur la crête, il dispose deux hautes sculptures, sorte de guetteurs du grand paysage, en bordure du sentier. Volontairement, l’artiste ne donne pas d’interprétation à ses installations : avec intuition, il dispose ses pièces et laisse ensuite à chacun le soin d’y projeter ses rêves ou ses réflexions.

 

Depuis 2008, deux nouveaux groupes de silhouettes, “Confluences Nomades” font écho à l’ensemble de “Silence des Lauzes”. Installées sur les crêtes en bordure de la vallée au nord, vers le plateau, et au sud vers La vallée de l’Ardèche, les sculptures de “Confluences Nomades” et du “Silence des Lauzes” forment une ligne où le regard porte loin… LIEN VERS CONF NOM

 

 

La résidence

La résidence ne pouvait se dérouler en un seul séjour. En effet, les pièces de bois doivent d’abord être taillées, puis envoyées au traitement avant installation. C’est pourquoi le principe d’une résidence en trois étapes s’est imposé. Sur la base des premières esquisses, l’association, en lien avec le Parc, a fait livrer deux grumes d’un hêtre coupé dans la forêt des Chambons sur le plateau ardéchois à quelques kilomètres du sentier. Pour poursuivre son travail, Christian Lapie est donc venu pour la seconde fois fin décembre 2002. Après avoir fendu les grumes à la cognée, il a taillé les huit silhouettes. Il a décidé de leur implantation et défini les tâches à réaliser par des membres de l’association avant l’installation définitive (traiter les silhouettes en étuve à Langogne, préparer les socles en ciment, les socles en métal, etc.)

 

Du 6 au 12 avril 2003, Christian Lapie a passé une semaine à Saint-Mélany pour rencontrer les élèves des écoles, des habitants, etc. Avec des bénévoles de l’association, après les avoir mis en place et teinté, il a installé les silhouettes définitivement.

 

Le 12 avril 2003, plus de 150 personnes – dont Henri Belleville, Président du Parc Naturel Régional, le Conseiller Général, des membres du Parc, de la Region et du département- partaient de Saint-Mélany pour découvrir le long du sentier l’œuvre de Christian Lapie. L’inauguration, suivie d’un buffet, a eu lieu au terme de la balade, sur les crètes aux pieds des guetteurs de la vallée de la Sueille. Christian Lapie a nommé son œuvre : le Silence des Lauzes.

 

L’ensemble de la résidence a été suivie par l’artiste photographe Anouck Durand-Gasselin.