Célie Falières

[ Résidence labo octobre 2022 ]

« Je suis arrivée à Saint Mélany le 22 septembre. Les bogues étaient en train de s’ouvrir dans la châtaigneraie et les chasseurs faisaient de petites tâches orange dans les bois. J’avais ramené des fossiles, des livres, des outils sans trop savoir la direction à prendre, un kit général et rassurant. J’appréhendais le paysage sauvage et pourtant fortement marqué par toutes les constructions vernaculaires, une succession de terrasse de murets et de renforts.

J’étais encore dans l’observation quand j’ai rencontré Laurent Mayet au marché ; Laurent avait de la nappe de laine de ses brebis, il m’a dit que je pouvais venir à Pourcharesse essayer de feutrer. Je ne dis jamais non à une nouvelle technique et j’ai vu un sentier à prendre, après tout, tout dans le métier de berger parle du territoire. Le feutrage est un exercice sensoriel complet : odeurs, chaleur, effort physique, froid, humidité, viscosité, douceur.

Suite à cette première rencontre, j’ai construit un vêtement de statue guidée par les couleurs, par une impression de vestige ressentie au pont du Charnier, par des souvenirs de Jean Cocteau, Peter Greenaway ou de Chris Marker. Le pont du Charnier est devenue une Arcadie dans laquelle j’incarnais le discobole ou Zeus d’Histiaea. J’ai construit un vêtement pour me donner une place dans le paysage. »

« Et les Grecs, en gens raisonnables, ne se donnaient pas la peine de fignoler le dos de leurs statues », dit Jacob, protégeant ses yeux du soleil et remarquant que les parties de la sculpture non destinées à être vues étaient demeurées à l’état brut. Il remarqua également cette légère irrégularité, dans la disposition des grès, que « le sens artistique des Grecs (comme on peut le lire dans le guide) préférait à l’exactitude mathématique. » »

CELIE FALIERES